Comme chacun sait , le gouvernement a décidé de modifier les règles applicables aux réductions de capital en obligeant l’actionnaire à passer obligatoirement par la case dividendes et donc à subir le précompte mobilier de 30%. On ne dénoncera jamais assez cette mesure qui, selon ses auteurs vise soi-disant à mettre fin à des abus constatés (quel abus y a-t-il pourtant à récupérer sans impôt sa mise de fonds ?), mais n’a en réalité qu’une visée purement budgétaire. Cette disposition, dont on peine à comprendre la moindre logique et justification (le seul argument avancé est qu’un pays voisin applique le même régime), fait partie de ces moyens inventés par l’Etat pour compenser à tout prix la baisse prochaine du taux de l’impôt des sociétés. Toujours est-il que les nouveaux textes sont déjà produits (article 18,2bis, nouvel article 184 alinéa 5 et article 264, alinéa 1, 3°, c du CIR) et nous permettent de comprendre la manière dont il convient d’appliquer le nouveau régime.
Deux étapes sont requises pour calculer le précompte mobilier sur les réductions de capital dès 2018.
Dans un premier temps, il faut calculer le coefficient de répartition des remboursements en utilisant la fraction suivante : au numérateur, la somme du capital libéré, des primes d’émission et des parts bénéficiaires assimilées au capital libéré, et au dénominateur, la somme des réserves taxées, des réserves exonérées incorporées au capital et du montant déterminé au numérateur. Le projet de loi précise que certaines réserves taxées et certaines réserves exonérées ne seront pas prise en compte : il s’agira essentiellement de la réserve de liquidation et de la réserve spéciale de liquidation (qui conservent leur régime fiscal propre- c’est la moindre des choses… ), des réserves occultes (tels des excédents d’amortissement par exemple), de la réserve légale à concurrence du minimum légal, des plus-values de de réévaluation ou encore de la réserve indisponible pour actions propres.
Dans un second temps il faut calculer l’ordre d’imputation du prorata sur le capital libéré et sur les réserves taxées visées par le régime. La disposition légale prévoit l’ordre d’imputation suivant pour les réserves : d’abord sur les réserves taxées incorporées au capital, puis sur les réserves taxées non incorporées au capital et enfin sur les réserves exonérées non incorporées au capital.
L’article 184 alinéa 5 nouveau du CIR précise que le montant du capital libéré n’est toutefois pas diminué à concurrence de la quotité de la réduction qui a été imputée sur les réserves taxées ou exonérées. Il faut donc le « revaloriser ». Cet ajout s’est avéré nécessaire pour éviter une double imposition (lors de disparition à terme desdites réserves). En pratique cela requiert d’incorporer dans le capital fiscal une réserve négative.
Faut-il préciser que quelques exemples d’application de ce nouveau « machin » fiscal sont nécessaires pour comprendre ces règles ?
Exemple Soit une société avec un capital (exclusivement libéré sur la plan fiscal) de 10.000 EUR, une réserve légale de 1.000 EUR, une réserve de liquidation de 3.000 EUR et des réserves disponibles de 5.000 EUR. Il n’y a pas de réserve exonérée ou de réserves occultes. Une réduction de capital de 2.000 EUR est envisagée.
Le coefficient sera de 10.000/15.000 sera de 66,67 % (le dénominateur ne comprend pas la réserve légale et la réserve de liquidation).
L’imputation sera la suivante : imputation fiscale sur le capital libéré 2.000 x 66,67 % = 1.333,33 EUR et donc imputation sur les réserves taxées (soumises au précompte de 30%) de 666,67 EUR.
Au passif du bilan, la seule modification sera la diminution du poste Capital qui passe de 10.000 EUR à 8.000 EUR (modification du montant du Capital social).
Le tableau du capital fiscal est en revanche adapté comme suit :
Capital libéré : 10.000 EUR – 1.333,33 EUR = 8.666,67 EUR
Réserve taxée négative incorporée au capital = 666,67 EUR
Capital à revaloriser : 10.000 EUR – 1.333,33 EUR = 8.667,67 EUR.
Dans la déclaration fiscale, la diminution des réserves de 666,67 EUR (apparition de la réserve négative incorporée au capital) sera compensée par un dividende du même montant. La société devra donc retenir un précompte mobilier de 200 EUR.
Pas de base imposable car le prélèvement ne porte sur aucune réserve exonérée
Par Pierre-François Coppens, Conseil Fiscal IEC